June Chester

Créée pour le forum Last Island

Une école au bout du monde sur une île perdue, des professeurs et des élèves très particuliers, bienvenue dans votre nouvelle vie.


19h. Le repas de famille. Comme tous les derniers soirs des vacances, nous étions tous réunis autour de la grande table du salon pour partager aussi bien un rôti, que toutes les choses qui avaient pu s’écouler dans nos vies depuis la dernière fois que nous nous étions tous vus. Inlassablement identique à la dernière fois, mon père racontait la même anecdote sur son oncle Henry, et ma mère rigolait, comme toujours. Comme toujours aussi, mon frère sortait son « Raconte nous plutôt une histoire de cul ! Ca s’ra plus marrant ! »  Ce à quoi mon père répondait par son habituel « Fiston ! Voyons ! Pas devant June ! Maintenant, mange. » Et nous mangions en silence, comme toujours. C’était ça mes parents. Des gens trop snob pour oser dire les choses. Trop bourges pour se décoincer le cul d’leurs chaises. Ils savaient pas s’que c’est la vie ...

 

La vie c’est bien plus que ça. Heureusement, il y a Max, mon frère. A leurs yeux, nous sommes les enfants parfaits. Aux yeux des autres parents aussi. Parce que les adultes ne savent pas regarder les gens tels qu’ils sont, et s’arrêtent simplement à l’apparence qu’ils donnent. Max, c’est un vrai connard pourtant. Il drague tout ce qui bouge, il joue, il manipule, il est faux avec tout le monde, sauf avec moi. Il est génial, il dit qu’autrement, la vie est bien trop ennuyeuse, et essaye de rendre la vie des gens plus passionnante. Même si parfois il en fait un peu trop, moi je donnerai ma vie pour lui. Même s’il est carrément con. En ce qui me concerne, j’aime jouer les enfants modèles. Mes parents ne me connaissent pas, mais alors pas du tout. Et vous non plus d’ailleurs. On continue ? On parla de politique, de travail, d’études, et de tous les autres sujets que les ado détestent en général, jusqu'à ce que Max sorte « Vous voulez pas fumer un joint pour vous décoincer un peu le cul là ? ». Bon, ok, cette phrase là, elle était différente à chaque fois, sinon, ça marcherait plus. Mais l’effet était toujours le même : Mon père nous envoyait au lit. Croyait t’il que malgré mes quinze ans j’en étais choquée ? Haha haha


23h. Le mur. Oui, je fais le mur. Quasiment tous les soirs. Vous voulez savoir comment je fais ? C’est divinement simple. Je mets ma tenue de soirée, c'est-à-dire le plus souvent une mini jupe et un haut destoy, avec des hautes chaussettes, ou une robe provocante, selon mon humeur, puis j’enfile ma robe de chambre par-dessus. Ensuite, lorsque je descends dire bonne nuit à mes parents je n’ai plus qu’à bifurquer à droite au lieu d’à gauche en repartant, et me voila dehors. En ce qui concerne ma robe de chambre, je la mets dans un sac poubelle, que je n’aurais plus qu’à récupérer en rentrant. Le reste, Max s’en charge. Il est cool Max, il s’en fout que j’n’ai que quinze ans, il me laisse vivre ma vie et ne passe pas son temps à s’inquiéter pour moi. Bon, et ensuite, j’ai plus qu’à trouver un miroir pour me maquiller de noir, à retrouver Marthe, et à filer. Mais ne vous méprenez pas : Marthe, ce n’est pas une amie, c’est juste qu’elle est assez cruche pour m’accompagner, et que se ramener toute seule, ça craint. Bref. Ce soir, c’est rêve party, et j’ai 30g à vendre. Vous v’nez ?


00h. La boite. L’entrée, c’est le plus important. C’est là que les gens se font une première image de toi, et en mon cas, faut les mettre en confiance. « Salut John ». Le videur, il me connait, j'suis là tout les dimanches. « Salut June, vas y, entre ». Et c’est là que tout se joue. Tète haute pour montrer que tu es sure de toi, tu fixes les gens des yeux, surtout vu que les miens sont verts, et tu rejettes tes cheveux en arrière. Et là, tout peux commencer. Je fume, je danse, au milieu. Je drague aussi, un peu... Rien qu’un peu. Puis il arrive, celui que j’attends, prés de la porte. Je vais le voir. « Salut June, alors, c’est ce soir qu’on baise ? » « T’as gueule Olive. Bon, j’ai 30g à vendre, si tu m’en rapporte au moins 100 dollars, j'couche avec toi ce soir ok ? ». Le jeu est lancé, maintenant, j’ai plus qu’à m’amuser, et à échanger les quelques grammes qu’il me reste contre quelques parcelles de rêves.  Je vais donc près du bar en commandant une bière. Un blond arrive par derrière moi et sort « Lui paye t’inquiète Jo’ » ; je regarde l’intéressé droit dans les yeux, ce qui n’est pas déplaisant, et lui demande « Tu me payeras pas autre chose qu’une bière ? ». Et c’est là qu’il l’a sortie. La petite pilule bleue. J’les aime bien, les bleues, elles sont cool… On a dansé, il m’a embrassé, je l’ai avalée. C’était… WAH.


1h30. Le debut du rêve. Oui, j’étais dans un rêve. C’est les gens comme ça que j’aime, les gens qui m’emmènent loin, très loin de la réalité, qui me font du mal, au fond, mais en même temps tellement de bien. Le reste, c’est rien. Il n’y a que ça qui compte. Mais qu’est ce qui compte au fond ? S’amuser. Moi, j'me comprends pas. Fin je comprends pas grand-chose. Pourquoi je ne suis pas comme les autres ? Les filles de mon âge sortent avec des gentils garçons, elles leur donnent la main. Moi j’baise tous les mecs que j’veux. Elles font des soirées pyjama, moi j’viens là. Elles achètent des bonbons, et moi d'la drogue. C’est quoi le problème avec moi ; Pourquoi j’suis pas comme les autres ? J’ai grandie trop vite ? J’ai pas d’amis. J’aime pas les gens, ils perdent leur temps, ils ne savent rien de la vie. Ils passent leurs journées à essayer d’être heureux, ils croient que la vie est belle, ils sont terriblement naïfs. La vie, elle est pas belle, et elle fait pas de cadeau. Le monde, il est pourri. Les hommes, ils auront beau tout essayer de changer, c’est trop tard, ils ont tout foutus en l’air. Mais c’est p’être moi qui comprend rien après tout. Des fois, j'me dis que j'suis pas née dans l'bon sens, genre, j'suis sortie d'ma mère à l'envers, et  tous les mots qu'j'entends j'les entends à l'envers, les gens qu'j'devrais aimer j'les hais et les gens que je hais... BAM. Voila, je suis tombée. C’est la fin du rêve. Mais la fin du rêve, c’est où ?


3h. Oliver. C’était la seule chose que je reconnaissais autour de moi, et il était assis a à peine deux mètres. Le reste, ça ne me disait rien. Il y avait un parc, des lumières, des arbres ; pas un bruit, mis a part quelques éclats de rires. Mais je n’avais plus peur de me réveiller sans me souvenir de rien. Ca finissait presque par être agréable… Car sans savoir en ayant fait quoi, je savais que j’avais été heureuse durant les deux dernières heures, et ça me donnait la preuve que j’avais bel et bien quittée ce monde de brute pour ça. J’avais planée ouais. Total planée. Et qu’est ce que c’était bon ! Et la nuit n’était pas finie. Olivier me fixait, « J’ai 120 dollars » qu’il m’a dit. Alors je lui ai fait signe de se rapprocher, puis sans me poser de questions, j’lui ai roulée une grosse pelle et j’ai glissée la main dans son pantalon. Ouais je sais, j’suis pas une fille bien. Mais j’en ai pas envie. Ensuite, il m’a déshabillée, et il m’a fait l’amour. Et pour être franche, j’le regrette pas, par ce qu’écoutez moi bien les filles, Olive, c’est carrément un bon coup enfaite. On l’a même refait une deuxième fois, histoire que je sois bien sure, et tellement c’était bon. Mais on a du s’arrêter en plein milieu, lorsque j’ai entendue l’église sonner les six heures. Fait Chier. La soirée était finie, ma dernière soirée de l’été… Ca fait tellement du bien de se faire du mal en bien.  J’sais pas si j’vais être capable d’arrêter.


6h30. Le retour. J’avais due courir pour arriver à l’heure à la maison, et je n'étais jamais arrivée parce qu'un con avait eu la bonne idée de débouler en voiture pile au moment où je traversais la rue devant la maison. Les heures suivantes ? Je m'en souviens pas et c'est p'tre aussi bien, comme ça j'ai pas vu la tronche de mes vieux, ni même celle de mon frère. Je m'étais retrouvé à l'hôpital mais ça ne m'a pas permis d'échapper au sermon, malheureusement ... Mes frasques avaient été découvertes pendant mon ... "absence" et pour une fois mes parents voulaient s'occuper de moi. Non sans déconner, ils avaient enfin réalisé que je n'étais pas un bibelot qu'on posait là et qu'on oubliait. Ils voulaient me sortir des emmerdes et m'aider à être une autre mais je n'avais pas envie moi ! Mais je ne pouvais dire un mot, je devais subir et fermer ma gueule comme la bonne fifille qu'ils voulaient avoir.


1 mois plus tard. Une île perdue. Mais qu'est-ce que je foutais sur ce bateau en direction d'une île perdue au milieu de nul part ... Après m'être remis de mes blessures, mes parents m'avaient annoncés qu'ils avaient trouvés le lycée parfait pour moi. J'avais failli pleurer en voyant où il était ... Déjà que les joints et tout le reste me manquait mais là ils signaient mon arrêt de mort. Qu'est-ce que j'allais bien pouvoir faire là-bas ... Surement me faire chier avec des fils à papa qui ne savent même pas s'amuser sous la couette. Mais ici, à l’aube de cette rentrée, certains nouveaux ne me connaissant malheureusement pas osent venir m'adresser la parole. « Salut ! J’peux m’assoir ? T’es seule ? On a qu’à être amie ! » Tssss. « J’ai pas d’amis. » « Ah ! Ca tombe bien ! Moi non plus ! Tu sais jouer au cartes ? ». Le voyage allait être long. Trop long ... Et là, j’ai vaguement pensée à un truc : Et si cette année j’essayais d’me faire des amis ?